CESAR (Caius Julius)
Jules César
Caius Julius Caesar (en français Jules César) est né à Rome, sans doute en juillet 101 avant J.-C., d’une famille patricienne qui prétendait descendre de Iulus, fils d’Énée, et par là même de Vénus. Cette famille pourtant n’appartenait pas au cercle des très grandes dynasties ; elle n’apparaît en pleine lumière qu’à la fin du IIIe siècle : l’arrière-grand-père de César avait été consul en 157, son père fut seulement préteur vers 91, puis proconsul d’Asie. Son oncle, L. Julius Caesar, fut consul en 90. La grand-mère de César était une Marcia, d’une famille qui prétendait descendre du roi Ancus Marcius ; sa mère était une Aurélia, nièce du grand juriste P. Rutilius Rufus, sœur de deux consuls, démocrates modérés. Sa tante paternelle, Julia, avait épousé Caius Marius, l’homme nouveau, six fois consul, sauveur de Rome et chef du parti populaire. César avait été d’abord marié à une riche héritière de l’ordre équestre, et ses deux sœurs épousèrent également des hommes de la toute petite noblesse ou de l’ordre équestre. Mais pendant la domination de Cinna, chef du parti populaire de 87 à 84, on lui fit épouser Cornelia, la fille de ce dernier.
En danger lors de la dictature syllanienne, César doit quitter Rome : il profite de ses trois ans d’exil pour aller finir ses études en Grèce. Mais il rentre vite en grâce auprès des aristocrates successeurs de Sylla, et grâce à eux est nommé pontife en 74 ou 73. Entre-temps, il s’est déjà fait connaître par quelques faits d’armes durant ses années de service militaire (au siège de Mytilène en 81, en Asie et en Cilicie vers 73-72). En 71, il se fait élire tribun militaire. En 69, sans doute, il est élu questeur, ce qui lui assure un siège au Sénat, et exerce cette fonction en Espagne. Dès son retour, il commence à faire parler de lui, en réclamant le droit de cité complet pour les colonies de Transpadane. Dès lors, il s’allie avec Pompée, soutenant les lois Cornelia, Manilia et Gabinia, qui autorisaient le peuple, et non plus le Sénat, à relever certains individus des règles du cursus (ce dont César profitera lui-même) et qui conféraient à Pompée des commandements extraordinaires, contre les pirates et contre Mithridate. En 66, César est édile curule et, par la splendeur des jeux qu’il offre en s’endettant, il s’attire une grande popularité. Ici prend place l’obscure affaire de la prétendue « première conjuration de Catilina » : les élections de 66 ayant été cassées par les sénateurs conservateurs, on parle d’un complot, destiné à assassiner les consuls, à désigner Crassus dictateur et César maître de la cavalerie, avec peut-être mission d’annexer l’Egypte (Suétone, Vie des douze Césars , 11). Dans la période qui suit la restauration démocratique de 70, œuvre de Pompée, de Crassus et des tribuns populaires – où se mêlent les ambitions et le désir de revanche du personnel alors éliminé, les rancunes des syllaniens, la crise économique due aux guerres d’Orient, l’agitation agraire entretenue par les anciens colons de Sylla généralement ruinés –, les sénateurs modérés, appuyés par la majorité des chevaliers, financiers ou propriétaires des municipes, soutiennent la candidature d’un homme nouveau, que ses talents appellent au premier rôle, Cicéron. César, aristocrate démagogue, qui a donné des gages à tous les partis, à toutes les puissances, va mener un jeu personnel extrêmement habile, proposant les mesures les plus populaires, ne cherchant en fait que l’occasion de pousser sa carrière et d’accéder au pouvoir, sans partage si possible. Crassus, recherchant l’alliance des marianistes, s’allia donc avec César. Ce dernier fut désigné en 64 président d’un tribunal criminel : il en profita pour citer les complices des proscriptions syllaniennes, mais renonça à cette fonction lorsque Catilina fut traduit devant lui.
En juillet 64, Cicéron est élu consul pour 63. Il va avoir à lutter sur tous les fronts, contre la conjuration hétéroclite et subversive de Catilina, contre l’extrême droite du Sénat qui ne lui pardonne pas d’être un homme nouveau, contre les amis de Pompée, enfin contre Crassus et César ; ce dernier, élu préteur, se fait désigner par le parti pompéien comme président d’un jury de haute trahison pour juger un vieillard, C. Rabirius, accusé d’avoir tué les tribuns réformateurs en 100 avant J.-C. : avertissement à Cicéron. Soupçonné de complicité avec Catilina, César n’hésite pas à dénoncer le premier la conjuration à Cicéron, quitte à s’attribuer ensuite le beau rôle de refuser la mise à mort sans jugement des complices arrêtés. Son rôle ambigu lui permettait d’apparaître à la fois comme un profond politique, un démocrate ennemi de la « loi martiale » et un homme de gouvernement. En même temps, élu préteur pour 62, il soutient la proposition de Metellus Nepos de rappeler Pompée avec les pleins pouvoirs afin de remettre de l’ordre à Rome. Il va désormais participer aux efforts coalisés de Caton, de Pompée et des catiliniens rescapés pour saper le pouvoir immense et la popularité que son courage et son éloquence ont valus à Cicéron. Il avait été élu entre-temps grand pontife en 63, et il saura faire de ce sacerdoce le tremplin de ses ambitions.
César et Cléopâtre
Pompée était rentré d’Orient à la fin de 62 et il avait, comme il le devait, licencié ses troupes. Les immenses pouvoirs qu’il avait exercés en Orient, son prestige déjà ancien en faisaient incontestablement le premier personnage de Rome. Mais il désirait se faire reconnaître cette prééminence, à laquelle s’opposaient généralement les sénateurs. Ceux-ci refusaient de sanctionner ses décisions en Orient et de donner des terres à ses vétérans. Crassus, de son côté, n’attendait qu’une occasion pour accroître sa puissance et recevoir à son tour une province. Quant à César, il avait obtenu en Espagne le titre d’imperator , grâce à des victoires heureuses, et trouvé de l’argent pour payer en 59 ses énormes dettes. De retour en 60, il réclamait un triomphe, mais y renonça afin d’avoir le droit de briguer le consulat. Les ambitions des trois hommes se rencontraient. Ils décidèrent d’unir leur influence et leurs intrigues. Grâce à Pompée et Crassus, César serait élu consul pour 59 ; il s’engageait à faire voter les mesures réclamées par Pompée depuis deux ans, la ratification de ses acta, la loi agraire pour ses vétérans. Crassus et Pompée obtiendraient un second consulat. Ce syndicat de politiciens ambitieux est communément désigné sous le nom de « premier triumvirat ».
Le consulat de César marque une date, comme celui de Cicéron : c’est, comme en 63, un consul – et non un tribun – qui prend véritablement la tête de l’État et anime la politique. César déploie une grande activité législative : il commence par présenter une loi agraire, qui reprend l’essentiel des propositions de Rullus en 63 et de Flavius en 60, et qui est surtout destinée à pourvoir de terres les vétérans de Pompée, en lotissant ce qui restait du domaine public en Campanie ; elle prévoyait aussi des lotissements en faveur de la plèbe urbaine. Mais le collègue de César, Calpurnius Bibulus, homme des conservateurs, ainsi que les leaders de la droite au Sénat, Caton et Lucullus, tâchèrent, par des manœuvres de procédure, de faire obstruction. César passa outre, fit arrêter un moment Caton et fit voter sa loi par les comices tributes. Les soldats de Pompée avaient fortement influencé le vote. Cette épreuve de force, entamée dès le début du consulat, avait démasqué les triumvirs : Bibulus se retira chez lui, se contentant d’afficher des édits contre César et notant systématiquement tous les vices de forme qui pourraient justifier l’abrogation de ses actes. César cependant reprenait aussi le programme traditionnel des populaires : il présentait et faisait voter une loi sur les publicains d’Asie, qui accordait enfin aux sociétés de fermiers généraux la réduction du taux de leurs versements à l’État pour les contrats passés en 65. Ainsi César s’assurait de solides appuis parmi les financiers et les juges. En même temps, il proposait à son tour une loi judiciaire sur les « sommes extorquées », sévère pour les sénateurs, et qui renouvelait l’interdiction pour eux de se porter soumissionnaires de l’Etat. Elle aggravait aussi les charges contre les gouverneurs de province. Ces deux mesures étaient destinées à complaire à Crassus et à ses alliés, les chevaliers. La loi de rege Alexandrino, d’autre part, reconnaissant les droits de Ptolémée Aulète sur l’Egypte, lui donnant le titre d’allié et d’ami, ouvrait les portes à une intervention future et rapportait à son auteur d’énormes pots-de-vin. La publication des Actes du Sénat et des Actes du peuple romain, dont le consul prit l’initiative, lui assurait d’autre part une facile popularité. En même temps, il resserrait ses liens avec Pompée en lui donnant sa fille en mariage et épousait Calpurnia, la fille d’un préteur qui devait être consul en 58, s’assurant ainsi l’appui de ce noble influent. Mais surtout, César profita de sa magistrature pour préparer l’avenir. Il s’agissait pour lui d’obtenir une province militaire qui lui permette d’acquérir gloire et argent. Un tribun à la solde du triumvirat, P. Vatinius, proposa un plébiscite pour lui attribuer pour cinq ans (jusqu’en mars 54) la Cisalpine et l’Illyricum, avec trois légions, le droit de choisir ses légats et d’établir des colonies. Le Sénat, par surenchère, y ajouta la Narbonnaise, qui était en état d’insurrection larvée, et une légion. En même temps qu’il obtenait ainsi ce qu’il espérait depuis longtemps, César prenait ses précautions pour laisser derrière lui une situation politique troublée, qui nécessiterait tôt ou tard son arbitrage. Il s’agissait d’abattre Cicéron qui, contre les triumvirs et les ultras du Sénat, avait essayé de fonder une sorte de tiers parti, autour des chevaliers. César favorisa le passage à la plèbe du patricien P. Claudius, lequel briguait le tribunat pour 58 ; c’était un catilinien, ennemi de Cicéron, au service, pour l’instant, de César. Dès le 10 décembre, Clodius – il avait changé l’orthographe de son nom – fit éloigner Caton à Chypre et annonça son intention d’obtenir l’exil de Cicéron ; César put assister à Rome, avant de gagner sa province, au début de cette manœuvre, que Pompée laissa mener.
Jusqu’au début de 58, César hésitait entre deux actions militaires : le roi dace Burebistas, depuis plus de vingt ans, avait organisé ses tribus et, bousculant Boïens et Illyriens, faisait peser une lourde menace sur les marches nord-est de l’Italie. Le libellé de la rogatio Vatinia montre que César avait songé à une guerre dans cette direction. Mais Burebistas, vers la fin de 59, s’était retiré vers l’est et assiégeait Olbia. Et surtout, depuis 60 avant J.-C., un nouveau danger planait sur la Gaule, et peut-être sur l’Italie elle-même, qui n’avait pas perdu le souvenir des menaces des Cimbres et des Teutons : le chef suève Arioviste avait réussi à s’immiscer dans les rivalités intérieures qui opposaient les Éduens, les Séquanes et les Arvernes pour la domination de la Gaule, et les avait successivement battus en Alsace. D’autre part, les Helvètes, dont un chef avait un moment essayé, en accord avec certains dirigeants Éduens et Séquanes, d’établir une sorte d’hégémonie sur la Gaule, pressés par les Germains, décident d’émigrer vers la Saintonge et demandent l’autorisation de traverser le nord de la province romaine. Ce double danger, germain et gaulois, donne à César l’occasion d’intervenir et d’entreprendre la conquête des Gaules. Ce dessein cependant n’apparaît pas tout de suite très clairement : le premier but de César est surtout de se forger une armée, de se procurer des clientèles et de l’argent. La première campagne (58) fut consacrée à battre et repousser les Helvètes et les Germains, avec d’ailleurs l’appui de peuples gaulois, surtout les Éduens, alliés et amis. En 57, César s’attaqua à la Belgique, encore à demi sauvage, et lança ses lieutenants vers les peuples riverains de la Manche : campagnes rapides, établissement d’une sorte de protectorat assez lâche. En 56, il s’attaqua aux Gaulois de l’Atlantique et vainquit sur mer les Vénètes, pendant que Crassus, le fils du triumvir, son légat, menait une guerre un peu à part contre les Aquitains. En 55, son projet est de passer en Bretagne, mais il doit d’abord combattre des peuplades germaniques qui pénètrent sur la rive gauche du Rhin, vers son embouchure : cela lui donne l’occasion de traverser le Rhin pour la première fois. Puis il passe en Bretagne avec deux légions, mais pour trois semaines seulement. Il recommença en 54, avec des forces plus importantes ; cette fois, il pénètre dans l’intérieur du pays, bat et rend tributaires (du moins en principe) les Bretons de la vallée de la Tamise. Jusqu’alors la politique de César était, après avoir montré sa force et battu les divers peuples gaulois, d’installer partout des sortes de protectorats, en favorisant dans chaque cité un prétendant ou une faction ; il n’était pas question d’annexion pure et simple, mais d’une sorte d’hégémonie exercée à titre personnel plus qu’au nom de Rome. Mais à la fin de 54, la révolte commence un peu partout, d’abord dirigée contre les partisans gaulois de César, puis contre les légions qui hivernent : chez les Carnutes, chez les Éburons de l’Ardenne, chez les Trévires. Malgré le calme apparent des autres peuples gaulois, qui protestent de leur fidélité, les troubles politiques à Rome et en Italie, l’échéance de la fin du proconsulat de César (renouvelé en 56) entretenaient en Gaule un climat d’insécurité. Le chef Éburon révolté, Ambiorix, traqué, demeurait insaisissable. Profitant de l’absence de César, pendant l’hiver 53-52, des chefs carnutes lancent un vaste appel à la guerre de libération ; les Carnutes massacrent dans Genabum (Orléans) les commerçants romains et le chef de l’intendance de César. Un jeune noble arverne, Vercingétorix, fils d’un homme qui avait en son temps aspiré à la royauté, lève une armée de partisans et de mercenaires, se fait reconnaître roi et, bientôt, commandant en chef de l’insurrection, qui groupe la plupart des peuples du centre de la Gaule. Pour la première fois, les insurgés menacent les frontières de l’ancienne province. César fait une diversion vers le pays arverne, par les Cévennes, puis rejoint le gros de ses troupes vers Sens. Vercingétorix avait fait adopter la tactique de la terre brûlée, mais les Gaulois ne peuvent se résoudre à l’appliquer à Avaricum (Bourges), et la ville est prise par César. Descendant vers le sud, celui-ci essuie un échec devant Gergovie. Peut-être se prépare-t-il à évacuer la Gaule, lorsqu’il bat, grâce à sa cavalerie germanique, l’armée gauloise près des sources de la Seine. Vercingétorix commet alors l’erreur de se réfugier dans Alésia et de laisser César l’enfermer dans une double ligne de fortifications. Malgré l’arrivée d’une armée de secours, trop nombreuse et mal employée, la garnison doit capituler. En 51, César poursuit la répression contre les Carnutes, les Bellovaques, les Armoricains. En 50, les derniers irréductibles sont pris et massacrés dans Uxellodunum. Mais César sait aussi employer la clémence et confisquer à son profit l’esprit féodal des Gaulois, dont un grand nombre étaient prêts à le servir : il donne aux chefs la citoyenneté romaine et enrôle leurs fidèles dans ses troupes auxiliaires. Par l’usage alterné de la sévérité et de la clémence, il achève, avant l’expiration de ses pouvoirs en 50, de briser les velléités d’indépendance gauloise.
Il peut de nouveau se consacrer à ses ambitions romaines, d’autant plus que sa conquête lui a permis de forger un instrument militaire de premier ordre. Son armée, qui se compose à la fin de la guerre de onze légions, dont une recrutée en Transalpine, est, après neuf ans de combats sous ses ordres, profondément différente des armées républicaines traditionnelles. Le soldat est mieux payé, mieux entraîné, mieux traité par César, à la fois généreux et exigeant ; surtout, les cadres moyens – les centurions – ont acquis un esprit de corps et un dévouement extraordinaires ; César a facilité aussi la promotion de nombreux Italiens des municipes, soldats, centurions, tribuns ou préfets ; son armée est plus démocratique que celle de ses futurs rivaux. Sur le plan technique, il se crée peu à peu une cavalerie permanente ; bref, l’instrument de guerre de conquête peut se transformer, du jour au lendemain, en instrument de guerre civile, sans que le chef ait à redouter les réactions de ses troupes.
La guerre civile et la conquête du pouvoir
En quittant Rome pour sa province en 58, César avait laissé son parti consolidé, ses adversaires, Cicéron et Caton, exilés, Pompée impuissant entre le désordre et le parti aristocratique. Mais l’opinion inquiète, celle de l’Italie surtout, impose le rappel de Cicéron qui tente de regrouper un « parti italien et modéré » contre Clodius et les populaires extrémistes, lesquels échappent d’ailleurs à César. Quant à Pompée, il hésite entre ses alliés du triumvirat et la réconciliation avec Cicéron. Le proconsulat de César devait expirer en 54 : n’ayant pas terminé la conquête, ce dernier désire une prolongation ; il l’obtiendra en resserrant les liens avec Crassus et Pompée. L’entrevue a lieu en mars 56 à Lucques : l’or gaulois permet d’acheter un grand nombre de consciences. César obtient le paiement de la solde de ses troupes, la prolongation de son commandement jusqu’en 50, la promesse du consulat pour 49 (dix ans après le premier). Pompée et Crassus seraient consuls ensemble en 55, puis Pompée recevrait les Espagnes, Crassus la Syrie, avec la perspective de faire une grande expédition.
César abandonnerait Clodius et laisserait Rome à Pompée ; en revanche, il se réserve l’annexion éventuelle de l’Egypte.
Contre la coalition des triumvirs, toute résistance était impossible : Cicéron, qui avait une certaine sympathie pour César comme homme, se rallia, mais les allures de monarque que se donnait Pompée à Rome ne tardèrent pas à l’inquiéter. L’alliance entre Pompée et César avait été scellée par un mariage dynastique, Pompée épousant Julia, fille de César ; mais cette dernière meurt en 54. À cette même date, Crassus est tué à Carrhae, et Pompée voit sans grand déplaisir son seul rival aux prises avec la révolte gauloise et songe à profiter des troubles grandissants en Italie pour se faire reconnaître, officiellement cette fois, une sorte de dictature à Rome ; faute d’y réussir, il est du moins élu consul sans collègue, en 52, et du coup prépare ouvertement l’arsenal juridique qui lui permettra, le jour venu, d’éliminer César et ses amis. Il aspire à être un nouveau Sylla.
Désormais, la guerre civile est inévitable, car César sait qu’il ne pourra pas abandonner ses pouvoirs et son armée avant d’être sûr de son élection comme consul pour 49 : telle est la fameuse « question de droit » de l’expiration des pouvoirs qui va empoisonner la vie politique romaine et mener à la guerre civile. César et Pompée se renvoient la balle, luttent par tribuns et consuls interposés, chacun refusant d’abandonner ses pouvoirs tant que l’autre les garde. Le Sénat est en fait favorable au départ des deux protagonistes. Cependant, fin 50 et début 49, les aristocrates confient à Pompée le soin de « défendre la République » et le commandement des légions en Italie. César rassemble ses troupes, envoie au Sénat un véritable ultimatum, et, lorsque les tribuns qui lui sont favorables doivent quitter Rome où la loi martiale est déclarée, il a le prétexte qu’il lui fallait pour franchir le Rubicon. Contre l’armée des Gaules, le Sénat et Pompée disposent des légions d’Espagne et des 130 000 hommes que Pompée est autorisé à lever en Italie.
La guerre civile, sans cesse renaissante, va durer pratiquement jusqu’en juillet 45. D’un bout à l’autre du bassin méditerranéen, elle opposera individus, familles, classes sociales, Romains des provinces, mais aussi indigènes et princes vassaux. La première phase (janv. 49-oct. 48) est déterminante : elle voit la foudroyante conquête de l’Italie par César, grâce au ralliement des plèbes et des bourgeoisies municipales d’une part, aux rivalités de ses adversaires d’autre part. Pompée fait alors prévaloir une stratégie originale qui consiste, en s’appuyant sur la maîtrise de la mer, à gagner, avec la plupart des magistrats et des sénateurs, la Grèce et l’Orient, où il compte tant de clientèles, à attirer César outre-mer et à le battre. Avant de combattre Pompée, César devait s’attaquer aux légions pompéiennes d’Espagne (siège et prise de Marseille au passage) : il les bat en août 49. Mais il subit des échecs en Afrique et dans l’Adriatique. En janvier 48, César se retourne contre Pompée, installé en Épire, et fait passer le détroit de Brindes, non sans mal, à ses troupes. D’abord en difficulté pendant plusieurs mois, il finit par remporter à Pharsale, en août, la victoire décisive : d’août à octobre, tout l’Orient tombe entre ses mains, y compris l’Egypte, où Pompée avait été assassiné.
D’octobre 48 à mars 47, César est comme enfermé en Egypte, réglant la succession du trône à sa guise, mais en butte aux révoltes de la plèbe d’Alexandrie, à l’attaque de l’armée des prétendants. En juillet-août 47, campagne contre le fils de Mithridate, Pharnace, en Arménie. De décembre 47 à juin 46, guerre d’Afrique, contre les Pompéiens commandés par Scipion, Caton et Cn. Pompée, qui avaient réussi à rassembler dix légions. César finit par les battre, ainsi que leur allié le roi de Numidie Juba, à la bataille de Thapsus, et Caton se suicide à Utique. Labienus, Varus et les fils de Pompée réussissent à gagner l’Espagne, où d’anciennes légions pompéiennes se sont révoltées contre les césariens. Après une très dure campagne, César les défait complètement à Munda (5 avril. 45 av. J.-C.). Il reste le seul maître, mais au prix de quatre ans de guerres de toutes sortes, auxquelles se sont ajoutées les révoltes ou mutineries de ses propres troupes, l’agitation sociale et politique en Italie même, souvent encouragée par certains de ses partisans, ou encore par la provocation d’anciens adversaires, comme Milon.
Trop occupé par la politique de l’immédiat, César n’a pas le temps d’organiser de façon systématique ses pouvoirs, d’autant que jusqu’à la fin subsiste, dans le camp adverse, une « légitimité » qui conteste la sienne. Cependant, malgré le rythme harcelant des campagnes, il avait déployé, dès janvier 49, une activité politique, législative et administrative prodigieuse, quoique souvent improvisée, et il songeait sûrement à établir son pouvoir quasi absolu sur des bases nouvelles et à accomplir des réformes politiques et sociales fondamentales. Lorsqu’il passe le Rubicon, en janvier 49, César n’est plus que grand pontife : son proconsulat a expiré et son pouvoir sur ses armées n’est qu’un pouvoir de fait. Il profite de ses pouvoirs religieux pour invalider les élections, y compris celles de son successeur, et retrouve ainsi son proconsulat. Mais pour parer à l’absence de la plupart des sénateurs et des magistrats, aux dérobades de ceux qui restaient, il se contente d’utiliser sans ménagement ses droits de vainqueur et prend seulement des mesures de circonstance. Ce n’est que pendant la première campagne d’Espagne qu’une loi lui confère une dictature extraordinaire semblable à celle de Sylla ; il l’utilise pour régler des problèmes économiques ou administratifs, pour distribuer à ses partisans les provinces qu’il tenait, mais la dépose à la fin de 49 et se fait élire régulièrement consul pour 48 – année où il ne met pas les pieds à Rome, le gouvernement en Italie étant assuré par son collègue P. Servilius Isauricus. Après Pharsale, sur proposition de son collègue, il fut nommé dictateur une seconde fois, pour un an. En 46, c’est comme consul qu’il combat en Afrique et célèbre ses triomphes ; il sera encore consul en 45, sans collègue, jusqu’en octobre. Mais entre-temps, sans doute en avril 46, il avait été nommé dictateur pour la troisième fois, pour dix ans, avec renouvellement chaque année (Bell. Hisp. , 2, 1) ; il renouvellera en effet cette dictature en avril 45, jusqu’en janvier ou février 44, où il sera nommé dictateur à vie. Cette même année, d’ailleurs, il revêtira à nouveau le consulat, pour la quatrième (ou la cinquième ?) fois.
Sans doute la puissance de César, pendant toutes ces années, a été le plus souvent une puissance de fait, et il ne s’encombrait guère de légalisme. Pourtant il a pris soin de se faire octroyer, outre la dictature et le consulat, d’autres pouvoirs ou d’autres titres : la praefectura morum après Thapsus, l’inviolabilité tribunicienne, mais surtout, après Munda, le titre d’imperator permanent, ainsi que des honneurs civiques et religieux considérables. Ainsi apparaît nettement une marche vers le pouvoir monarchique, qui devait peut-être aboutir, au mois de mars 44, à la restauration de la royauté. Quels que soient les pouvoirs dont il disposait, César avait en tout cas réalisé, de 46 à 44 surtout, une mainmise à peu près totale sur le Sénat, les assemblées populaires, les magistratures. De 47 à 44, entre ses campagnes, il entreprend une série de réformes profondes, en partie inspirées par le « programme » que lui traçait peut-être Salluste dès 49, et portant sur la composition du Sénat, très élargi, ouvert à des Italiens non romains et même à des Gaulois, sur la réforme des tribunaux, sur la liste des citoyens (réduction du nombre des bénéficiaires de l’annone), sur la vie économique de l’Italie (mesures en faveur des travailleurs agricoles libres, réduction du nombre des esclaves, lois somptuaires, établissement de colonies) ; mesures concernant les gouvernements des provinces, accroissement, au moins provisoire, du nombre des questeurs et des préteurs, apparition des consulats, etc. Mais il est évident que jusqu’à sa mort, en 44, César apparaissait comme le vainqueur d’une guerre civile, et que chacun aspirait à l’établissement d’une nouvelle constitution.
L’Egypte et la politique orientale de Rome
Dans quelle mesure César puis Antoine se prêtèrent-ils à la prétention qu’avait Cléopâtre de restaurer le royaume lagide sans le laisser devenir province romaine et tout en conservant l’amitié de Rome ? Il n’est pas facile de répondre, car l’un et l’autre, au gré des événements, changèrent d’avis.
En ce qui concerne César, il n’est guère douteux qu’à son arrivée à Alexandrie, il était désireux d’annexer l’Egypte purement et simplement.
Il semble bien que la romanesque entrée en scène de Cléopâtre modifia les intentions du général. Mais les troubles d’Alexandrie, la guerre qui faillit lui être fatale, la visite qu’il fit de la vallée lors de cette remontée du Nil qui fut davantage une enquête d’homme d’Etat qu’un voyage de noces, tous ces motifs d’inquiétude lui firent sans doute renoncer à l’annexion et préférer une alliance. Suétone nous indique une crainte supplémentaire de César : réduite à l’état de province, l’Egypte, en cette période troublée de l’histoire de Rome, pouvait offrir à un gouverneur ambitieux le moyen non seulement d’affamer l’Italie en la privant de blé, mais de lever des troupes, de rallier d’autres pays orientaux et, qui sait, de renverser le pouvoir central. Crainte justifiée, car plus tard Octave interdira aux sénateurs l’accès de l’Egypte, de peur que l’un d’eux n’en fasse un tremplin pour s’élancer vers la magistrature suprême. Maintenir la dynastie en restant militairement maître du pays était donc la solution la plus commode que César pût adopter. Il n’est pas sûr qu’il s’en soit toujours tenu à cette idée. Après avoir installé trois légions à Alexandrie, disposé des garnisons au Caire et dans le pays, quand il invita à Rome Cléopâtre et son jeune frère-époux, il méditait sans doute quelque dessein politique.
Deux années consécutives et jusqu’à sa mort il retint le roi et la reine d’Egypte dans cette cage fleurie des jardins de la rive droite du Tibre ; il pouvait de la sorte administrer l’Egypte par l’intermédiaire du chevalier qui y commandait ses quatre légions. Sa mort rendit à Cléopâtre la liberté : dans la confusion qui suivit le crime, et moins d’un mois après, vers le 15 avril, date à laquelle Cicéron commente sa fuite dans une lettre à Atticus, elle quittait Rome pour Alexandrie. Si, César mort, elle redevenait reine effective d’Egypte, n’est-ce point que, César vivant, elle n’était que reine nominale ?
Imaginer, au contraire, que la présence de Cléopâtre à Rome s’explique par le rôle actif qu’elle y aurait joué et prêter réellement à César l’intention, quatre siècles avant Constantin, de transporter à Alexandrie sa capitale, c’est sans doute accorder trop de poids à une réflexion de Suétone et c’est donner trop de portée à la légitimation de Césarion ainsi qu’au projet de mariage avec Cléopâtre. Comment César aurait-il pu gouverner l’Italie à partir d’Alexandrie ? Pourquoi, dans le testament qu’on découvrit après sa mort, ne faisait-il aucune place à Césarion ? Comment aurait-il imposé aux Romains une monarchie à l’égyptienne ? Il est certain que les projets d’hégémonie que nourrissait Cléopâtre étaient voués à l’échec tant que César vivait. Elle ne tarda pas à exploiter sa mort.
Sans doute avait-elle des intentions précises. Octave, qui venait à Rome faire valoir ses droits, n’avait que dix-neuf ans et Antoine, maître alors de la situation, s’était depuis longtemps déclaré l’ami de la reine d’Egypte, qu’il avait connue quand elle n’avait que treize ans et qu’il avait beaucoup fréquentée à Rome. Cléopâtre n’était pas femme à négliger les hommages de l’adepte le plus zélé du parti césarien qui, dès la mort de César, avait pris le parti du fils reconnu, Césarion, contre le fils adoptif, Octave. Pour lutter contre Octave, Antoine avait besoin des ressources et des richesses de l’Egypte. On peut se demander quelle fut la part des calculs politiques d’Antoine dans cette union qui dura près de quinze ans et se termina par un double suicide.
Trois périodes, à cet égard, sont à distinguer. La première va de la mort de César, en mars 44, à la séparation d’Antoine et d’Octavie, en février 37, c’est-à-dire à la rupture d’Antoine avec l’Occident. C’est l’époque où Octave et Antoine se disputent l’Empire naissant. Quand Antoine se rend, dans l’hiver 41-40, à Alexandrie, il a besoin de l’Egypte pour conquérir l’Empire, mais l’Egypte n’est qu’un atout dans ce jeu difficile. Antoine s’assure de la neutralité du royaume lagide, puis, par l’accord de Brindes, en septembre 40, et par son mariage avec Octavie, sœur d’Octave, il partage avec ce dernier le monde romain, oubliant durant quatre ans Cléopâtre et l’Egypte.
Au cours de l’automne 37 avant J.-C., Antoine s’embarque pour Corfou et se lance à la poursuite de son rêve oriental. Il prend la résolution de couper tous les liens avec Rome, jusqu’au jour où il pourra en devenir le maître. Comme César dix ans plus tôt, il n’envisage pas une province de l’Egypte, mais une restauration de l’empire lagide. Dans cette nouvelle politique, les raisons personnelles ont leur place : Cléopâtre lui a donné deux enfants dont il veut assurer l’avenir. De là cet accord capital conclu à Antioche avec Cléopâtre : il lui promet le mariage, la reconnaissance de Césarion comme son héritier, la restauration de la puissance égyptienne. Ainsi sont dessinées les grandes lignes de l’Orient romano-hellénistique, qui remaniait celui de Pompée et préfigurait celui d’Auguste. Mais l’échec d’Antoine contre les Parthes, sa lamentable retraite, son retour à Alexandrie sur les vaisseaux de Cléopâtre modifient fondamentalement cet équilibre. A partir de 36, Antoine, qui a prétendu se servir de Cléopâtre, n’est plus qu’un jouet entre ses mains. Elle compense la diminution de ses forces par un accroissement de ses ambitions : il s’agit de faire de l’Orient une sorte d’empire fédéral ptolémaïque dont le centre sera Alexandrie. C’est le rêve d’Alexandre, sans son génie ni surtout ses moyens. Ce rêve splendide sombrera dans les eaux d’Actium.
L’œuvre de Cléopâtre
La propagande orientée et hostile des thuriféraires d’Auguste n’a pas toujours accablé la reine d’Egypte, la regina meretrix de Properce et de Pline. Le silence de César, dans La Guerre civile, et celui de l’auteur de La Guerre d’Alexandrie tendraient également à prouver que l’un et l’autre avaient peu de reproches à lui faire, et des auteurs plus tardifs ont laissé des jugements favorables. S’il était honteux, pour les partisans d’Auguste qui voulaient accabler Antoine et l’accuser d’avoir trahi le nom romain, d’être « égyptienne » (encore que cette descendante des Lagides n’eût sans doute pas une seule goutte de sang égyptien), n’est-il pas au contraire honorable, ou à tout le moins habile, que cette reine grecque soit la première de sa famille à parler l’Egyptien, qu’elle ait cherché à rallier à sa cause les gens de la chôra (c’est-à-dire de la province, par opposition à la capitale, Alexandrie), qu’elle ait assumé des rituels pharaoniques négligés par ses prédécesseurs ? Dès la première année du règne, elle intronise le taureau sacré Bouchis et, pour la première fois dans toute l’histoire de la dynastie ptolémaïque, adopte le rituel traditionnel pour la naissance de Ptolémée-Césarion-Horus, fils de César - Amon et de Cléopâtre - Isis. Elle veut que ce fils né d’un Romain soit reconnu par l’opinion égyptienne. À la différence de tous ses prédécesseurs, qui ne voulaient être que « rois d’Alexandrie », elle s’appliqua à être « reine d’Egypte ». Le trône pour elle ne fut pas un patrimoine que l’on dilapide, mais une patrie que l’on dirige. Ce seul souci la distingue nettement et honorablement de tous les autres Lagides.
Elle se rendit compte que l’Egypte ne pouvait plus se suffire à elle-même, qu’elle ne pouvait plus rester fermée sur elle-même, forte de son passé immémorial et de ses traditions séculaires. En ce pays dont l’ancienneté enchantait Platon et tous les Grecs, dans cette Egypte immuable dont l’art, les institutions, les gouvernements ne semblaient subsister qu’en vertu de la force acquise au cours des siècles – au point que les Ptolémées ne firent qu’adopter ou adapter les institutions pharaoniques et que les Romains utilisèrent les institutions ptolémaïques plutôt qu’ils n’en apportèrent de nouvelles –, Cléopâtre fit preuve de la qualité la plus rare, la plus neuve : l’imagination. Elle sut se tourner vers cette force nouvelle qui pointait à l’Occident, Rome, dont on ne savait trop alors quel était l’élément dominant. Car, en ne considérant que le règne de son père, Ptolémée XII Aulète, Cléopâtre pouvait se demander à bon droit de qui il était le protégé. Devait-il son trône au Sénat et au peuple romain qui l’avaient reconnu comme allié et ami en 59 avant J.-C., et qui avaient refusé d’appliquer les clauses du fameux testament de Ptolémée IX Sôtêr II, autorisant le peuple romain à annexer l’Egypte et Chypre quand bon lui semblerait ? Etait-il roi grâce à César, qui, d’abord partisan de l’annexion de l’Egypte, avait changé d’avis après s’être rapproché de Crassus et de Pompée, après avoir obtenu le consulat et sans doute reçu des subsides et des promesses du Lagide ? Régnait-il grâce à Pompée, qui rêvait d’obtenir des titres de reconnaissance auprès du roi d’Égypte et dont l’homme de main dévoué, A. Gabinius, avait ramené Aulète à Alexandrie ? Dans le champ d’intrigues qui définit donc Rome à cette époque, Cléopâtre chercha la force capable d’affermir le royaume lagide. S’attacher à César, c’était miser sur l’Empire, mais elle ne pouvait prévoir l’échéance des ides de mars.
S’il fallait de l’imagination pour inaugurer cette politique occidentale qui rompait avec les traditions ptolémaïques, faisant d’Alexandrie la capitale de l’Orient hellénistique, il n’en fallait pas moins pour penser que le royaume lagide, en pleine décadence, pourrait s’allier à Rome sans perdre son individualité. Ce fut pourtant le pari de Cléopâtre, dont aucun acte ne témoigne qu’elle ait cherché à aliéner le royaume d’Egypte en se prêtant à son annexion par Rome. Sans doute est-ce là qu’elle fit preuve du sens politique le plus averti. Connaissant les problèmes inextricables de son pays, la pesanteur paralysante de ses institutions et de ses traditions, l’instabilité de sa situation économique et sociale, elle comprit que de sa précarité même l’Egypte pouvait tirer sa plus grande force. En effet, si Rome avait besoin des richesses égyptiennes, de la situation privilégiée de l’Egypte, de son rayonnement politique et culturel, une alliance avec le royaume lagide était préférable à une colonisation riche de conflits et de complications. Cléopâtre ne démissionna jamais de son rôle de représentante du peuple égyptien, d’héritière des Ptolémées. Elle eut soin de renforcer le nationalisme égyptien, le traditionalisme de sa politique intérieure. Il fallait que le Romain comprît que la reine d’Egypte pouvait être une alliée, non une sujette. Inversement, il fallait que le peuple égyptien, confiant en la reine d’Egypte, acceptât l’orientation nouvelle de sa politique extérieure. En un mot, il fallait que la reine, sans rien abdiquer de ses prérogatives, obtînt l’appui étranger nécessaire pour sauver le royaume.